Fermeture du quotidien iPad The Daily: un mauvais quotidien qui ciblait mal son public

3 décembre 2012 à 11:59

Moins de deux ans après son lancement, The Daily – le premier quotidien exclusivement publié sur l’iPad – ferme ses portes. Cet échec était à mon avis prévisible. Non pas que le modèle d’affaires essayé par News Corp ne tient pas la route, au contraire, mais plutôt parce que The Daily était un quotidien de second ordre, qui visait mal son public potentiel.

The Daily a été lancé au début 2011 par le magnat de la presse Rupert Murdoch. Le projet était ambitieux: créer un véritable quotidien, avec une véritable salle de nouvelle, mais offrir le journal exclusivement sur l’iPad dans un premier temps, et sur les tablettes Android l’année suivante.

Le quotidien était payant, mais abordable, à 0,99$ par semaine, ou 39,99$ par année.

Deux années plus tard, c’est la fin.

En annonçant la fermeture de The Daily le 15 décembre prochain, Rupert Murdoch explique dans un communiqué que sa compagnie ne pouvait trouver un public suffisamment important pour la convaincre «que le modèle d’activité était soutenable à long terme».

Quel est ce modèle d’affaires exactement?
Selon les chiffres avancés par News Corp lors du dévoilement de ses résultats trimestriels du premier trimestre de 2011, The Daily coutait 500 000$ à produire par semaine, et la société aurait eu besoin d’environ 560 000 abonnés pour couvrir ses frais. Visiblement, elle ne les a pas trouvés.

L’objectif n’était pourtant pas irréalisable. Aux États-Unis seulement, il y aurait environ 47,5 millions de tablettes en circulation, dont 30 millions d’iPad, et ce nombre ne fait qu’augmenter d’année en année.

En plus, les propriétaires de tablettes ont généralement déjà un certain revenu disponible, et une bonne partie d’entre eux, surtout sur iPad, sont déjà habitués de payer pour du contenu sur leur tablette.

Je doute que Rupert Murdoch aurait pu atteindre 560 000 abonnés à court terme (il n’y croyait pas non plus), mais à long terme, l’objectif était réalisable, surtout en rendant son journal accessible ailleurs dans le monde.

En théorie du moins, car en pratique, il semble que ce n’ait pas été le cas.

Le mauvais quotidien, le mauvais public
Le problème de The Daily n’était pas son plan d’affaires. Le problème, c’était le journal en tant que tel.

The Daily était l’équivalent numérique d’un tabloïd comme le New York Post. Un canard riche en potins, en sport, et en nouvelles cinglantes, mais pauvre dans à peu près tout le reste.

Ce genre de journal attire généralement beaucoup de lecteurs. Mais je doute fortement que les propriétaires de tablettes électroniques soient un échantillonnage représentatif de la population.

C’est dommage, car Rupert Murdoch n’avait pas lésiné sur les moyens lorsqu’il a lancé son Daily. S’il avait privilégié une ligne éditoriale plus intelligente – il en est parfois capable, comme le démontre son Wall Street Journal – The Daily aurait certainement eu de meilleures chances de réussir.

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